Au début des années 90′, et jusqu’à la fin des années 00′, les rappeurs étaient tournés vers le monde et la société. NTM, IAM, Assassin, La Cliqua étaient autant de groupes qui déversaient dans leurs textes une critique intelligente d’une société qui avait laissé une partie de sa jeunesse sur la bas côté de la route. Non pas donneur de leçon, le Rap des 90′ n’était pas conscient mais censé. Aujourd’hui, les rappeurs sont plus dans l’introspection. Le Rap a débarqué dans les chichas et les clubs. Le Rap est devenu festif, et l’engagement est laissé aux seuls indépendants du R.A.P.
Parmi ces rappeurs qui tentent de faire revivre le Rap des 90′, il y a Fiks Niavo. Le colosse de deux mètres est loin d’être un novice. Il a commencé avec Sinik au sein de Ulteam’ATom, le groupe phare de la cité des Ulis. Il a fait ses armes avec Grodash. Et a formé un binôme avec son associé Pkaer. C’est surtout dans le milieu associatif que Fiks réussira à faire parler de lui. Pour apporter un peu poésie là où les rêves sont enterrés six pieds sous terre, il animera des ateliers d’écriture. Ne dites pas à Fiks que le salut vient forcément du Rap, il sait lui même que les arts urbains sont quelques fois les barreaux invisibles qui empêchent les jeunes de vraiment sortir de la cité. Mais puisqu’ils peuvent oublier ou fantasmer le quotidien avec les doux lyrics du Rap, Fiks en sera.
Fiks rejoint très vite le réseau Rezus. Il réalisera un documentaire « Allo Marianne bobo » qui a connu un vrai succès au delà du milieu militant. Fiks se refuse à jouer le rôle du « noir de service ». Il choisit ses interventions dans les médias, ne veut pas jouer au « bon sauvage » ni à la caution « de couleur ». Il revient en ce début d’année avec un projet très fort intitulé « Jeunes Vétérans 2.0 ». Ce projet marque toute l’ambivalence de Fiks Niavo et ses influences US.
Avec des titres comme « Racines » ou « Champs de Coton », Fiks exhibe les cicatrices qui lui viennent de l’esclavage. Les Afro-français ont été moins touchés que les afro-américains par le drame de l’esclavage ou le racisme. Non pour Fiks, ils sont juste moins bien organisés. Si l’Amérique a connu de grand leaders comme Malcolm X ou Martin Luther King, si l’Afrique a connu ses grands noms comme Sankara ou Patrice Lumumba, l’Europe a oublié de faire des héros, elle a construit des rebelles. « Jeunes Vétérans 2.0 » connaîtra un vrai succès d’estime.
Fiks Niavo revient cet été avec une mixtape intitulé « Kartier Général Radio » qui cette fois ci est dans l’air du temps. Même si le comparse d’A.Kanouté n’est pas un amateur de Trap, il a décidé de faire de sa dernière mixtape un véritable exercice de style. Il Trappe et Rappe. Le premier extrait de sa mixtape est un hommage aux victimes du massacre qui continue encore dans la région du Nord Kivu.
Et oui on ne se refait pas.